Primavera

Primavera
Primavera de Botticelli (imagem da Google)

ADÁGIO


Tão curta a vida e tão comprido o tempo!...
Feliz quem o não sente.
Quem respira tão fundo
O ar do mundo,
Que vive em cada instante eternamente.

Miguel Torga































domingo, 20 de junho de 2010

La virgule de José Saramago

La virgule de José Saramago
pour Le Monde.fr 18.06.10 17h55 • Mis à jour le 19.06.10 17h16


"J'écrivais un roman comme les autres, avait-il expliqué au "Monde des Livres" du 17 mars 2000. Tout à coup, à la page 24 ou 25, sans y penser, sans réfléchir, sans prendre de décision, j'ai commencé à écrire avec ce qui est devenu ma façon personnelle de raconter, cette fusion du style direct et indirect, cette abolition de la ponctuation réduite au point et à la virgule. Je crois que ce style ne serait pas né si le livre n'était pas parti de quelque chose que j'avais écouté. Il fallait trouver un ton, une façon de transcrire le rythme, la musique de la parole qu'on dit, pas de celle qu'on écrit. Ensuite, j'ai repris les vingt premières pages pour les réécrire."

Après un premier essai infructueux, à la fin des années 1940, et un deuxième roman au milieu des années 1970, c'est avec Levantado do Chao (Soulevé de la terre, non traduit en français), qu'il trouve sa forme, au début des années 1980.

La clé du style de cet ancien serrurier est celle-ci : les dialogues chez Saramago se fondent dans un bloc de prose compacte. Ils sont introduits par une virgule, suivie d'une majuscule qui signale le changement de locuteurs. Cela donne des grands romans polyphoniques, labyrinthiques, comme Le Dieu Manchot (éd. Albin-Michel), L'Année de la mort de Ricardo Reis ou Histoire du siège de Lisbonne (éd. Seuil).

ART NARRATIF TOUT EN CIRCONVOLUTIONS

Les voix s'y entremêlent, les romans ressemblent à des opéras. Les voix des personnages se superposent et sont entrecoupées par celle du romancier omniscient, souvent ironique, quand ce n'est pas par celle de Dieu lui-même, dans L'Evangile selon Jésus-Christ (éd. Seuil). "Dans les divers arts, et principalement dans l'art d'écrire, le meilleur chemin entre deux points mêmes proches n'a jamais été, ne sera jamais et n'est pas la ligne droite", écrit-il dans Le Radeau de pierre.

Parce qu'il a mis du temps à le forger, Saramago manie avec aisance un art narratif tout en circonvolutions qu'il appuie sur une idée romanesque, dont il file la métaphore jusqu'au bout. "J'ai besoin d'entendre une voix qui dit ce que je suis en train d'écrire, alors le moteur commence à fonctionner, sinon ça n'avance pas. J'ai aussi besoin d'une idée forte. Je peux attendre trois semaines ou trois mois, il y a des pensées qui flottent et je rencontre l'idée que j'attendais, je le sais immédiatement", expliquait-il.

C'est ainsi que l'intervention d'un correcteur modifie le cours du siège de Lisbonne (Histoire du siège de Lisbonne) ; la péninsule ibérique se détache de l'Europe pour devenir une île (Le Radeau de pierre) ; Joseph, hanté par le massacre des innocents, se suicide (L'Evangile selon Jésus-Christ) ; un matin, tout le monde (ou presque) se réveille aveugle (L'Aveuglement). Chez Saramago, les idées (parfois un peu trop appuyées) font toujours la part belle à une riche imagination.


Alain Salles

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